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L’important pour Jerome Blake, c’est d’y croire

Il regarde vers le ciel.

Jerome Blake

Photo : afp via getty images / MICHAL CIZEK

Quand on fait défiler les photos du compte Instagram de Jerome Blake, ce qu’on voit en premier, ce n’est pas une piste de 400 m, mais des séances de photos de mode. C’est que le sprinteur fait du mannequinat pendant la saison morte, à Vancouver. Une façon, dit-il, de montrer un autre côté de sa personnalité.

Tu dois avoir confiance en toi pour poser devant la caméra, lance-t-il.

La confiance, c’est pourtant la quête de sa carrière de sprinteur. Une confiance qui grandit chaque fois où l'athlète de 27 ans enfile ses chaussures à pointes.

Les chronos que je veux réussir et dont je suis capable sont dans ma tête. Mais croire qu’on peut réussir quelque chose qu’on n’a jamais fait est une énorme tâche. Maintenant, j’y crois.

Une citation de Jerome Blake, sprinteur, champion du monde du 4 x 100 m

À quelques heures de l’ouverture de la saison de la Diamond League, à Doha, le sprinteur canadien et champion du monde du 4 x 100 m vise encore plus haut. Il pourrait bien s’aligner aux côtés de ses coéquipiers Andre De Grasse et Aaron Brown au 200 m au Qatar. Son nom figure sur la liste d’attente.

Jerome a vraiment progressé depuis deux ans, explique l’entraîneur-chef d'Athlétisme Canada, Glenroy Gilbert. Depuis [ les Jeux de ] Tokyo, c’est un gars complètement différent.

L'athlète originaire de la Jamaïque, qui s’est mis au sprint après son arrivée en Colombie-Britannique il y a 10 ans, ne cache pas ses ambitions pour sa deuxième saison chez les professionnels.

Mon but, cette année, c’est de courir [le 100 m] en 9,8 s. Si tu n’es pas rapide au 100 m, tu ne peux pas être pris en compte. Ça me fâche de ne pas pouvoir faire partie de la conversation.

Une citation de Jerome Blake

Apprendre aux Jeux

On est loin du sprinteur qui en était à ses débuts olympiques au Japon, il y a deux ans, celui que ses coéquipiers De Grasse, Brown et Brandon Rodney ont dû attendre au bout de la piste avant de lui remettre un drapeau du Canada pour célébrer leur médaille de bronze (devenue l’argent depuis) au 4 x 100 m. Blake a été le dernier à se joindre au groupe, car il était trop perturbé par sa performance.

Ils tiennent chacun un drapeau canadien derrière le dos.

Les sprinteurs canadiens Aaron Brown, Jerome Blake, Brendon Rodney et Andre De Grasse célèbrent leur médaille olympique du relais 4 x 100 m à Tokyo.

Photo : The Canadian Press / Nathan Denette

Je n’ai pas couru aussi bien que je le voulais. Je me suis étendu sur la piste et j'ai couvert mon visage. Je me suis dit : "Je ne veux pas voir. Je ne sais pas ce qui va arriver. On ne gagnera pas de médaille."

Une citation de Jerome Blake

C’était son unique épreuve à Tokyo. Le colosse de 1,90 m (6 pi 3 po) n’avait pas réussi à se qualifier pour les courses individuelles aux 100 et 200 m, au grand déplaisir de son nouvel entraîneur Dennis Mitchell.

Déjà, il fallait y croire, explique Jerome Blake, pour qui tout était nouveau.

C’était tous des professionnels de l’athlétisme, alors que moi, j’avais l’impression de pratiquer un passe-temps. J’ai dû grandir très rapidement. Et mon entraîneur qui me disait toutes ces choses : "Tu dois faire ça, tu dois être plus professionnel." Je sentais qu’il m’attaquait.

Il dit avoir parfois eu peine à croire en son travail. Il a dû tout reconsidérer. Le sprinteur de Kelowna a dû arrêter d’être l’admirateur auprès de ses rivaux et réapprendre à être le compétiteur, avec l’aide, notamment, de son entraîneur américain et d’une psychologue sportive.

Il termine une course avec deux autres compétiteurs.

Jerome Blake aux mondiaux d'athlétisme en 2022

Photo : afp via getty images / JEWEL SAMAD

J’ai appris à visualiser la façon dont je voulais faire ma course, comment je me voyais concentré dans mon couloir. Après un moment, j’ai réalisé que ces gars sont aussi des gens ordinaires et que je pouvais les battre. Une fois que j’ai fait ça, j’ai commencé à courir plus vite.

Une citation de Jerome Blake

Pour lui, c’est aussi simple que d’être conscient de ce qu'il fait au moment où il s’amène sur la ligne de départ, de ce qu’il doit faire, ici et maintenant.

Départ en trombe

La saison 2022 s’est amorcée sur les chapeaux de roues pour Jerome Blake, notamment lors de la compétition annuelle Adidas Boost Boston Games, en mai dernier. Il a gagné un 200 m sur piste droite en 19,89 s, une première pour lui sous les 20 secondes. C'était l'un des chronos les plus rapides de l’histoire en ligne droite.

Pourtant, raconte-t-il, personne ne parlait de lui comme d'un prétendant aux grands honneurs.

Pendant mon échauffement, j’ai entendu l’annonceur dire que la course se jouerait entre untel et untel. Les autres n’étaient que des figurants. Je me suis dit : "Je suis ici comme figurant. Je pense que je vais vous montrer." J’étais si déterminé à gagner la course.

Une citation de Jerome Blake
Jerome Blake sourit avec un bouquet de fleurs à la main.

Jerome Blake célèbre sa victoire au 200 m de la compétition Golden Spike à Ostrava.

Photo : afp via getty images / MICHAL CIZEK

Quelques semaines plus tard, il a refait le même coup au 200 m de la rencontre d’athlétisme Golden Spike, à Ostrava, en Tchéquie. Il a gagné malgré la fatigue et le décalage horaire. Un gros plus pour la confiance.

Faire face à des obstacles qui te poussent à mieux performer, c’est toujours une bonne chose. Pour moi, ça a été d’apprendre à performer malgré les problèmes ou le manque de préparation physique, que ce soit le peu de sommeil ou les voyages rapprochés des compétitions.

Courir malgré les blessures

La carrière de Blake était alors bel et bien lancée, mais le sprinteur n’a jamais pu être aussi rapide par la suite. Cinq jours plus tard, lors d’une course de la Diamond League à Rabat, au Maroc, une douleur au dos est apparue. Diagnostic : deux réactions de stress au bas du dos, une sorte d’ecchymose osseuse causée par un traumatisme ou une surutilisation. Cette blessure, Jerome Blake l’a traînée toute la saison sans vouloir l’ébruiter.

Une fois que les gens le savent, ça devient important. Et plus tu en parles, plus ça devient lourd. J’ai essayé de ne pas y penser. Tout ce que je faisais, c’est prendre des Advil, aller courir, recevoir un traitement et ainsi de suite.

Une citation de Jerome Blake
Il court aux côtés de deux autres sprinteurs.

Jerome Blake participe au 200 m des Championnats du monde en 2022 en Oregon.

Photo : getty images for world athletics / Andy Lyons

Lorsqu’il s’est amené aux mondiaux, Blake n’avait pas sprinté depuis deux semaines et demie. Il a recommencé deux jours avant sa première course au 100 m. Il s’est arrêté au premier tour éliminatoire. Frustrant? Oh oui! Heureusement, son coéquipier Aaron Brown, qui s’entraîne dans le même club en Floride, a fait son travail de mentor.

J’étais vraiment contrarié [après le 100 m] et je devenais furieux. Aaron m’a dit : "Tu dois redescendre sur Terre. Tu as encore une chance au 200 m. Alors, concentre-toi là-dessus." C’est ce que j’ai fait. Il m’a aidé à me recentrer.

Jerome Blake a finalement réussi à se qualifier pour les demi-finales du 200 m.

Si je deviens trop fébrile, j’oublie parfois le plus important. J’essaie donc de n'être ni trop enthousiaste ni trop dur envers moi-même. J’essaie de me maintenir "médium content". Juste au milieu.

Une citation de Jerome Blake

Et ce n’est pas sa blessure au dos qui l'a empêché de participer au 4 x 100 m des Championnats du monde à Eugene. Épreuve qu’il a brillamment courue avec De Grasse, Brown et Rodney pour le titre mondial. En fait, cette course était pour lui une façon de se racheter après ses performances individuelles plus ordinaires, sa façon de tout donner.

Ils sourient et tiennent des drapeaux canadiens.

Jerome Blake et ses coéquipiers canadiens célèbrent leur victoire au 4 x 100 m en Oregon.

Photo : Getty Images / Ezra Shaw

J’étais conscient de mes enjeux, mais je savais qu’il y avait trois autres athlètes qui comptaient sur moi, explique-t-il. Ce n’était plus juste moi. Et il y a tout le monde en coulisses aussi, les entraîneurs et le personnel. Et il y a les jeunes au Canada qui nous regardent et veulent faire la même chose que nous.

Est-ce que Jerome Blake avait cette conscience d’autrui aux Jeux de Tokyo? Pas du tout!, avoue-t-il.

Tout cela est un processus, lance Blake. Apprendre à performer sous la contrainte et lorsque les tensions sont extrêmes. C’est un jeu d’essais et erreurs.

Nouvelle saison, nouvelle attitude

Chaque saison amène un nouvel état d’esprit, a déjà dit Jerome Blake. En 2023, ce sera : plus gros et meilleur.

Il ne s’agit pas de savoir à quelle vitesse je cours maintenant. Car deux semaines plus tard, tout le monde l’aura oublié. Et la semaine suivante, quelqu’un aura peut-être fait mieux. Alors, à chaque course, je veux réussir quelque chose de meilleur, mieux exécuter.

Une citation de Jerome Blake

Le but, pour lui, est de réussir ses trois meilleures courses aux Championnats du monde, en août, à Budapest. D’ici là, il s’agira de tester différentes choses.

Aaron Brown devance Jerome Blake à l'arrivée.

Jerome Blake et Aaron Brown aux Championnats canadiens en 2022

Photo : The Canadian Press / DARRYL DYCK

Ce qui donne confiance au sprinteur, c’est que malgré un entraînement irrégulier pendant la saison morte, il a réussi deux chronos de 10,08 s et de 10,05 s à ses premiers 100 m en avril dernier. Cela est passablement meilleur que ses débuts en 2022 à 10,47 s et à 10,38 s.

Si je m’entraîne si mal et que je suis bien meilleur que je l’étais l’an dernier, je me dis : "OK, je peux certainement courir maintenant sous les 10 secondes [au 100 m] et sous les 20 secondes [au 200 m]. J’y crois maintenant.

Une citation de Jerome Blake

Les courses suivantes ont toutefois été plus modestes en ce qui a trait aux résultats pour l’athlète de 27 ans lors d’une rencontre au Botswana. Il a couru le 100 m en 10,39 s et a franchi les 200 m en 20,39 s. Rien pour écrire à sa mère.

Il se trouve à Doha en vue de la première étape de la Diamond League. Sauf que son nom est sur la liste d’attente. Il ne peut qu’espérer un forfait pour participer au 200 m.

Parions que Jerome Blake travaille fort pour maintenir son humeur à « médium content ».

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