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Le gouvernement du Nunavut veut ouvrir l’aire marine protégée de Tuvaijuittuq au tourisme

Une vue aérienne de montagnes et d'un glacier, dans l'Extrême-Nord du Nunavut, en juillet 2022.

Le gouvernement du Nunavut souhaite autoriser les activités touristiques, récréatives et de pourvoirie dans la zone de protection marine de Tuvaijuittuq, dans l’Extrême-Arctique. Cette image montre le fjord Milne, qui fait partie de l'aire marine, en juillet 2022.

Photo : CBC / Dustin Patar

Le gouvernement du Nunavut fait volte-face et souhaite désormais autoriser les activités touristiques, récréatives et de pourvoirie dans la zone de protection marine de Tuvaijuittuq, dans l’Extrême-Arctique. Hormis certaines exceptions, aucune activité humaine n’y est actuellement autorisée depuis les cinq dernières années.

Le ministère de l’Environnement du Nunavut a récemment demandé au ministère des Pêches et des Océans du Canada (MPO) d’adopter une résolution qui reconnaît que certaines activités peuvent avoir lieu dans une zone de protection marine ou que des activités spécifiques de tourisme, de loisirs et de pourvoirie sont en cours en vertu de l'article 35.1 (1) (c) de la Loi sur les océans.

Notre soutien n'est pas simplement conditionnel, mais il dépend d'une action immédiate et importante de la part du MPO, a déclaré la sous-ministre territoriale de l’Environnement, Yvonne Niego, dans une lettre (Nouvelle fenêtre) (en anglais) adressée à la sous-ministre des Pêches et des Océans, Annette Gibbons, le 25 mars.

Selon Yvonne Niego, ces nouvelles considérations ont émergé à la suite de la signature de l’entente de dévolution avec le gouvernement fédéral, au mois de janvier.

Elle n’a toutefois pas donné de détails sur le type d’activités touristiques, récréatives et de pourvoirie qui sont précisément envisagées.

Dernier bastion de la glace marine

En inuktitut, Tuvaijuittuq signifie l'endroit où la glace ne fond jamais.

Selon le MPO, l’aire marine protégée est considérée comme l’un des derniers endroits au monde à conserver de la glace de mer toute l'année. Elle possède d’ailleurs la glace de mer la plus ancienne et la plus épaisse de l’océan Arctique.

Lorsqu’elle a été créée, en juillet 2019, la zone de protection marine est devenue la première au pays à faire l’objet d’une protection provisoire.

Une vue aérienne d'une étendue de glace et d'une chaîne de montagnes.

Une fissure formée en 2009 sur le plateau de glace Milne, situé sur la côte nord de l'île d'Ellesmere, au Nunavut.

Photo : Photo fournie par Derek Mueller

Cette protection temporaire visait surtout à donner plus de temps au gouvernement du Canada, à l’Association des Inuit de Qikiqtani (QIA) et au gouvernement du Nunavut pour explorer la faisabilité de mesures de protection à long terme pour la zone.

Les paramètres de cette protection provisoire sont désignés dans un arrêté ministériel, établi en vertu de la Loi sur les océans. Actuellement, seules quelques exceptions s’y appliquent :

  • L’exercice des droits des Inuit de récolte des ressources fauniques, conformément aux droits ancestraux, énoncé dans l’Accord du Nunavut;

  • La recherche scientifique marine;

  • Les activités liées à la sûreté, à la sécurité et aux situations d’urgence;

  • Certaines activités menées par un ressortissant, une entité, un navire ou un État étrangers.

Au mois de juillet, l’arrêté ministériel arrivera toutefois à échéance. Le MPO souhaite le renouveler pour une période de cinq ans, mais le gouvernement du Nunavut le juge désormais trop restrictif.

Les mesures provisoires proposées, dans leur état actuel, semblent restreindre les activités de manière injustifiée, ce qui nous préoccupe grandement, affirme la sous-ministre de l’Environnement, dans sa lettre.

Une femme se tient devant une fenêtre, à Iqaluit, en mars 2023.

La sous-ministre de l'Environnement du Nunavut, Yvonne Niego. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Matisse Harvey

Le Ministère a décliné la demande d’entrevue de Radio-Canada, mais accepté de fournir une déclaration écrite. Une approche équilibrée permet une utilisation durable tout en protégeant l’environnement, soutient la porte-parole du Ministère, Leanne Babstock, dans un échange de courriels.

De son côté, le MPO affirme avoir reçu la demande du gouvernement territorial, mais n’a pas souhaité accorder d’entrevue. Pendant que le Ministère réfléchit à une réponse, il serait inapproprié de commenter davantage cette question, indique le conseiller en communications du MPO, Robert Rombouts, dans une déclaration écrite.

Entre juillet et septembre 2023, le Ministère a reçu l’appui des municipalités ainsi que des associations de chasseurs et de trappeurs des cinq communautés touchées, à savoir Grise Fiord, Resolute Bay, Pond Inlet, Arctic Bay et Clyde River.

Occasions d’emploi

Le président de l’Association inuit de Qikiqtani, Olayuk Akesuk, appuie la récente demande du gouvernement du Nunavut. Il estime que le tourisme dans ce secteur de l’Extrême-Arctique aurait des retombées positives sur le plan économique.

Nous voulons nous assurer que nous respectons le tourisme dans ce secteur, dit-il. C’est très important pour nous, si on considère les occasions d’emploi restreintes.

C’est l’occasion pour les personnes à l’extérieur du Canada de découvrir ce que nous avons sur notre territoire.

Une citation de Olayuk Akesuk, président, Association inuit de Qikiqtani

Il ajoute toutefois que le dossier fera l’objet de discussions lors de rencontres du conseil d’administration de l’organisme, au mois de juin. Nous devons [...] nous assurer que nous sommes tous sur la même longueur d’onde.

Un homme en veston se tient dehors, devant une rue d'Iqaluit, en juillet 2022.

Le président de l'Association inuit de Qikiqtani, Olayuk Akesuk

Photo : CBC

Des questions se posent, selon un chercheur

Derek Mueller est professeur au Département de géographie et d’études de l’environnement de l’Université Carleton, à Ottawa. Le glaciologue étudie depuis plus de 20 ans les effets des changements climatiques sur l’écosystème de la région, dont le dernier plateau de glace Milne.

Du point de vue de la conservation, dit-il, l’aire marine protégée de Tuvaijuittuq est un refuge pour les écosystèmes dépendants des glaces qui se trouvent dans l'Arctique.

Les modèles climatiques [...] semblent montrer que, de tous les endroits de l’Arctique, ce sera l’un des derniers où il y aura une glace de mer raisonnablement épaisse et susceptible de perdurer le plus longtemps, explique-t-il.

Une fissure dans un plateau de glace, dans l'Extrême-Arctique, en 2022.

Un cliché du plateau de glace Milne, environ deux ans après sa dislocation, en 2020.

Photo : Photo fournie par Cameron Fitzpatrick

Derek Mueller affirme que la demande du gouvernement du Nunavut soulève plusieurs questions quant à l’échelle de grandeur de futures activités touristiques.

Quelle que soit l’activité menée dans cette région, son impact doit être évalué, soutient-il.

S’il s’agit de petits groupes qui partent en expédition en ski ou en motoneige, les conséquences négatives sur l’environnement risquent d’être négligeables, dit-il. Évidemment, je pense que ce sera une tout autre histoire s’il s’agit, par contre, d’activités plus importantes [faisant appel à] des navires de croisière circulant 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.

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